ARBRE DE LA COMMUNION DES SAINTS
Nous avons planté un arbre dans cette église. Un arbre, à la fois tout à fait original et historiquement dans le fil de la plus ancienne tradition. L'arbre de Jessé. L'arbre de la communion des saints.
Dès les premières pages de la Bible, dans le poème de la création, l'arbre fait partie du décor : il est symbole premier et primordial. On le retrouve dans tous les récits les plus antiques développant les mythes de nos origines, dans toutes les cultures, dans toutes les langues, sous toutes les latitudes.
Dans le récit de la Genèse, au chapitre II, le premier homme vit, protégé, dans un oasis au milieu de la steppe désertique orientale. "Toutes espèces d'arbres séduisants à voir et bons à manger" l'entourent et le nourrissent.
Au centre du monde, un arbre ; ce thème est commun à de très nombreuses civilisations, de la Chine en passant par l'Inde et la Mésopotamie, jusqu'aux confins nordiques. L'arbre est l'axe du monde dans tous les mythes anciens. Il est le lien entre ciel et terre. Arbre éternellement vert, arbre de vie, puisqu'il ne semble pas connaître la mort. Arbre de vie puisque c'est grâce à lui que la terre est fertilisée, arrosée.
Aussi toutes les religions auront-elles eu tendance à rendre un culte à l'arbre qui n'est pas seulement plante, mais surtout dieu. En Israël, cette divinisation de l'arbre, ce péché idolâtrique, sera souvent dénoncé par les Prophètes.
Parmi tous les arbres de l'oasis primitif, le texte de la Genèse en souligne deux : "l'arbre de vie, au milieu du jardin", et "l'arbre de la connaissance du bien et du mal". (il ne s'agit ici que de l'arbre de vie)
L'arbre de vie, au centre du jardin, est le symbole de Dieu, source de Vie, de la présence du Dieu dispensateur de toute vie. L'arbre de vie, symbole de Dieu ? cette interprétation est soutenue par les comparaisons que la Bible fait elle-même entre les rois et les arbres, et les rois ne tiennent-ils pas leur, puissance de Dieu, le seul vrai Roi ?
Au Livre de Daniel, nous voyons le jeune prophète interpréter un songe du roi Nabuchodonosor en le comparant à un arbre :
"Il y avait au milieu de la terre un arbre d'une grande hauteur.
Cet arbre était devenu grand et fort, sa cime s'élevait jusqu'aux cieux.
On le voyait de toutes les extrémités de la terre. Son feuillage était beau et son fruit abondant, Il portait de la nourriture pour tous.
Il donnait l'ombre aux bêtes des champs,
Dans ses feuilles nichaient les oiseaux du ciel Et toute chair se nourrissait de lui."
De même Ezekiel compare Pharaon à un arbre magnifique. Ce sont autant de figures de rois divinisés. Comme les dieux, ils sont comparés à des axes du monde, comme les dieux ils protègent et donnent nourriture à tous les êtres vivants. Ils sont des sources d'eau vive.
A combien plus forte raison ces images s'appliquent à Dieu lui-même
Plus près de nous, dans les églises gothiques du Moyen-âge, on trouve des hauts-reliefs sculptés, à la manière d'un arbre généalogique, que l'on appelle arbre de Jessé.
L'arbre de la communion des saints, ici présent, s'inspire et de l'arbre de vie et de l'arbre de Jessé.
L'arbre de Jessé est la représentation figurée de la généalogie du Christ qui a pour origine un texte d'Isaïe et un texte de Mathieu selon lesquels de Jessé, père du roi David, 14 générations sont énumérées jusqu'à la déportation de Babylone, et 14 ensuite jusqu'à Jésus. "La branche qui sort de la racine, c'est Marie qui descend de David ; la fleur qui naît de la tige, c'est le fils de Marie. (Tertullien)
Dans les peintures, les sculptures, les vitraux toutes les représentations iconographiques du Moyen-âge, l'idée de la généalogie du Christ selon la chair se doubla de celle de la généalogie selon l'esprit.
Jessé, origine charnelle de Marie et de Jésus. Jésus, origine spirituelle de tous les saints:
L'arbre de la communion des saints remplace Jessé par Jésus, comme originant de ce nouvel arbre généalogique qu'est le Corps mystique du Christ, c'est-à-dire Jésus-Christ dont l'incarnation historique, visible, se prolonge par son Eglise, cette Communion des saints d'hier et d'aujourd'hui.
Ici en France, les fruits les plus populaires de cet arbre, de cette descendance spirituelle du Fils de David, sont des saintes et des saints, comme St Louis, Ste Jeanne d'Arc, St. Vincent de Paul, St Antoine de Padoue que la religion populaire a honorés. Plus près de nous, Le curé d'Ars, Jean-Marie Vianney, Ste Thérèse de Lisieux... ou bien, pas encore canonisés mais dont la fécondité spirituelle marque notre temps, Charles de Foucauld, Jean XXIII... Selon vos parentés spirituelles et vos sensibilités, chacune et chacun d'entre-vous pourrait ajouter à cet arbre de nombreux fruits d'hier et d'aujourd'hui, de St François d'Assise à Mère Teresa, ou de Thomas Beckett à Oscar Romero.
Une même sève anime et parcourt cet arbre immense sur lequel le Baptême nous a greffés.
Les Saints sont à l'image du Fils de Dieu, lui même étant "l'aîné d'une multitude de frères." (Rom. VIII, 29)
"Ceux que Dieu destinait à cette ressemblance, Il les a appelés ; ceux qu'Il a appelés, il en a fait des justes par le Baptême ; et ceux qu'Il a justifiés, Il les a aussi glorifiés."