Page : Syr05-09

Tayibat al-Imam, étude de la mosaïque ;

Le site se trouve sans un petit village situé à 15 km de Hama en direction d’Alep, dans le diocèse d’Epiphane-Hama. Les Antiquités syriennes ont fouillé depuis 1985 ce qui reste d’une église à 3 nefs dont le toit était supporté par des piliers distants de 2m. L’abside se trouve actuellement sous la petite rue qui la longe côté Est. La mosaïque découverte est exceptionnelle par ses dimensions : elle couvre la totalité du sol des trois nefs de 20m de large et de 26 m de long et surtout elle est riche d’enseignements et de représentations de la foi des premiers Chrétiens de Syrie. L’ensemble est en effet daté épar une inscription de 442 qui se rapporte à l’époque où Domnos était évêque d’Epiphanie-Hama. D’autres inscriptions nous donnent les noms des bienfaiteurs de l’église, les prêtres Epiphane et Valens et ceux de fidèles, Alexandra, Théodose, Promotos, Kartéria, Thia et de leur famille. Elle était dédiée aux Saints Martyrs, selon l’inscription disant : « Untel (nom effacé) fit mettre la mosaïque et embellir le portique des Saints Martyrs. » Ici le portique désigne la nef Sud où se trouve l’inscription. Les fouilles ont été étudiées dans le livre de Zaqzuq et Piccirillo publié en 1999 qui nous a fourni de nombreux renseignements précis sur ce que nous voyons.

Commençons donc notre visite par une vue générale : la disposition en trois registres de la nef centrale est symbolique de la marche des Chrétiens de leurs maisons de la Terre à leur maison du Ciel en passant par la proclamation de la Parole qui était faite dans le Bêma et les sacrements du baptême et de l’eucharistie.

Le bêma est cette plate-forme surélevée d’une ou plusieurs marches de forme U au centre de la nef centrale. C’est le lieu de la proclamation de l’Evangile. Sur l’inscription située dans le médaillon de l’octogone central situé juste sous la plate-forme, on lit : « (Untel fils) de Théodose a fit paver de mosaïques la surface de derrière le trône. ». Le trône occupe la place d’honneur au milieu de la banquette en bois où siègent les lecteurs. Il est situé au sommet de l’hémicycle. Ce n’est toutefois pas un siège, mais une sorte de lutrin sur lequel on expose un livre, un icône, une croix. Il a pu aussi être exécuté en bois. Il a un dossier élevé en forme d’arc de cercle, des accoudoirs et possède au revers un riche décor sculpté.

Le panneau ouest : la Terre. De bas en haut, on trouve quatre registres superposés faits alternativement de 2 croix et d’un octogone central ou de deux octogones et d’un carré central Un trame formée de parallélogrammes couplés donne de la profondeur et du relief aux dessins.
- Le cinquième registre qui touchait la façade est presque illisible hormis les motifs du faon à gauche et d’un oiseau à droite au sommet de leur croix respectives.
- Le 4º registre comprend trois édicules dans les deux octogones et le carré central. Sur les cartouches rectangulaires placés verticalement on trouve à gauche deux poissons face à face et à droite une caravane de chameaux se déplaçant vers la porte de l’édifice.
- Le 3º registre comprend une vasque située sur une colonnade avec sur la croix de gauche deux paons qui s’y désaltèrent et à droite deux agneaux assis avec au-dessus, première apparition du motif, un phénix. Le médaillon central reproduit une église en forme de croix surmontée d’une coupole.
- Le second registre retrouve les trois édifices disposés horizontalement et verticalement Deux scènes « nilotiques » de 4canards à gauche et 2 poissons affrontés à droite.
- Enfin le dernier registre reprend dans les croix le motif d’oiseaux buvant à la fontaine de grâce, des colombes dans celle de droite ; le médaillon central renferme l’inscription qui a trait au Bêma. Laquelle est surmontée à nouveau par un paon qui termine la composition.

Huit des édifices représentent des églises avec des architectures différentes illustrant les constructions de l’époque, église avec narthex, de plan basilical ; avec atrium frontal, en forme de croix grecque. Les nefs latérales Nef de gauche. Il faut lire e l4est à l’Ouest, c’est-à-dire de haut en bas : sous l’amphore aux oiseaux, variation sur le thème des vasques et fontaines, un arc monumental sans doute la porte d’une ville L’inscription dit ceci en grec : « Seigneur Jésus Christ, souviens-toi de ceux qui ont donné et travaillé pour ta sainte maison. ». Ensuite on trouve deux mules transportant un reliquaire (peut-être celui des saints martyrs ?) et se dirigeants vers un ensemble de bâtiments, ville ou sanctuaire ? Une lionne chasse un âne sauvage, un arbre les sépare encore, dans un paysage montagneux symbolisé par un amoncellement de pierres. Une inscription sépare cette scène d’une autre scène de chasse où un léopard tacheté poursuit un bélier à cornes entre des arbustes. Elle dit : « Seigneur, souviens-toi de ta servante Thia. Son nom t’est connu. » La bande s’achève avec deux moutons paisibles au pâturage. Nef de droite. Il faut lire cette fois de l’ouest à l’est c’est-à-dire de bas en haut. On voit essentiellement des scènes de chasses, un léopard et un cerf précédé dans sa fuite par une gazelle, un ours et une autruche effrayée battant des ailes, une lionne poursuivant une gazelle et enfin un autre fauve chassant un âne sauvage. L’inscription qui les sépare est celle dédiée aux Saints Martyrs.

Le panneau Est ou le Paradis Il est de loin le plus riche d’enseignements et de symboles. Il faut de bas en haut reconnaître à la fois les fleuves d’Eden dont les noms sont inscrits : Gihon, Phison, Tigre et Euphrate, mais aussi les eaux vives du baptême où jouent les poissons en grand nombre. cf. Ez 47. Au dessus de l’inscription signalant les donateurs de la mosaïque « devant l’abside », les eaux se rejoignent en un sommet sur lequel se tient un aigle. Cf. le Psaume 102 « il réclame ta vie à la tombe et comme l’aigle se renouvelle ta jeunesse » ; symbole christique de Résurrection ! A ce niveau des cerfs se désaltèrent à leur tour dans l’eau vive, selon la parole du psalmiste : « comme une biche languit après l’eau vive, ainsi mon âme Seigneur ».Ps 42.Ce sont les figures des catéchumènes et plus généralement de tout chrétien tendu vers la source de Vie. Au niveau supérieur et central trois édicules à colonnes sont séparés par deux paons. Dans l’édicule central un baldaquin auquel est suspendue une lampe abrite l’agneau pascal, celui de Dieu, symbole probable de l’eucharistie. Nous retrouvons donc ici les deux sacrements clés du christianisme, chemin vers la vie éternelle. Celle-ci nous est promise depuis les deux cités saintes de Bethléem et de Jérusalem -leurs noms sont inscrits-villes de l’incarnation et du salut, jusqu’à la rencontre du Christ en gloire représenté par l’oiseau phénix qui renaît de ses cendres et est toujours vivant. Il y en a de chaque côté ; leur tête est couronnée de rayons, ceux de notre soleil levant. Il s’agit donc d’une vision « idéale » du Royaume de Dieu et de la Théophanie du Christ. Les deux cités désignent le nouveau monde crée par Dieu et illuminé par l’enseignement et la présence du Christ, lequel est à la fois agneau, aigle et phénix. Notre groupe est resté longtemps à contempler, admirer et méditer l’expression si parfaite de notre foi que nous pouvons garder dans notre cœur et notre intelligence. Ce fut une véritable rencontre avec les Chrétiens syriens d’autrefois.

Retour à jour 5 ()
Retour à Tayibat



Retour à Accueil Syrie






Retour en page accueil


- - -