Le monde syriaque

Cour de M. Pérès

1         Préambule

« Le vingtième siècle a été pour l’ensemble des églises assyro-chaldéennes une véritable tragédie » Dans un article de la revue « Présence libanaise » une analyse montre que ce siècle aura vu plus de massacres de chrétiens que dans toute l’histoire des églises orientales. Ces massacres sont doublés d’un exode sans précédent vers les pays occidentaux. Le christianisme est en train de disparaître au proche orient.

Pendant la première guerre mondiale  « la Porte » (l’empire ottoman) était du côté de l’Axe ce qui a entraîné des persécutions qui ont fait 250000 morts chrétiens. En 1933 des massacres de chrétiens en Irak provoquèrent le début d’un exode important. Beaucoup de chrétiens d’origine syriaque sont actuellement en Seine saint Denis. Les chrétiens des églises orientales en Europe sont souvent oubliés par les autres églises : ils n’ont pas été invités à la dernière semaine d’oecuménisme…

2         Introduction sur la langue et la littérature syriaque

2.1        La langue syriaque



Les langues du monde syriaques proviennent d’une langue originelle : l’Accadien qui était une langue littéraire et diplomatique ayant emprunté au sumérien (-1500) son écriture cunéiforme . Cette écriture est constituée de signes syllabiques et de pictogrammes. A partir du IX° siècle avant J.C apparurent les premières inscriptions araméennes sur des stèles et des ostraca. Ces inscriptions se distinguent des anciennes par l’usage d’un alphabet emprunté au Phénicien (cf. Ugarit). Cette écriture alphabétique est plus facile à manier si bien qu’elle a réussi à s’imposer jusque dans l’administration assyrienne.


La dynastie babylonienne a imposé l’Araméen dans les échanges diplomatiques. La Phénicie, qui n’était pas un état unifié mais un ensemble de petits royaumes, avait une langue de communication, de commerce et de diplomatie. Cyrus donna un statut officiel à cette langue araméenne qui se développa de l’Egypte à l’Indus.

A Eléphantine, en haute Egypte, ont été découverts des documents juifs rédigés en Araméen. Après  la prise de Samarie en 762 avant J.C., les déplacements de populations favorisent la diffusion de la langue araméenne ; de là le Targum samaritain. En 539 av.J.C, les judéens de retour d’exil à Babylone répandent l’usage de l’Araméen (les Targumim.) Il y a des péricopes araméennes dans la Bible comme dans le livre d’Esdras.

Cette langue araméenne est raméfiée en de nombreux dialectes. Après la conquête d’Alexandre, ces dialectes tentent de résister au Grec qui devient la langue officielle. On trouve alors des stèles bilingues en grec (macédonien) et araméen, car les populations veulent garder leur langue.

L’araméen se présente sous l’aspect de divers rameaux, dont deux principaux :

2.1.1       Araméen occidental

Cet araméen est principalement représenté par le Judéo-palestinien qui sera la langue des premiers chrétiens et qui devient le Christo-palestinien dont nous avons quelques restes très proches du Syriaque. Son alphabet ressemble à ceux du Syriaque (il y en a trois). Il est aussi assez proche de l’Estranglo. 

Le Nabatéen et le Palmyréen du  premier au quatrième siècle après J.C.

2.1.2       Araméen oriental

Cet araméen est principalement représenté par le Mandéen ; c’est une langue très pure qui n’a que peu subi l’influence du Grec ou de l’Hébreu. On le rencontre dans le sud de l’Irak dans la région de Bassora. Les Mandéïstes ou Chrétiens de Saint Jean sont des baptistes teintés de gnose. Leur livre saint est le Ginza. Avant de découvrir les manuscrits de la Mer morte et de donner de l’importance aux Esséniens, les historiens des premiers siècles accordaient beaucoup d’importance aux Mandéïstes  (La mode est maintenant passée aux Esséniens…)

Le Judéo – Babylonien   C’est la langue du Talmud de Babylone (5° 6° siècle av J.C.) ce dialecte est très influencé par l’hébreu.

Le Syriaque semble provenir du NO de la Syrie : l’Osrhoène, la région d’Edesse (Urfa en Turquie du sud). Ce syriaque sera la langue des communautés chrétiennes de Mésopotamie et de Syrie. Les églises de Perse sont souvent de langue syriaque. Les Chrétiens sont souvent appelés « Syriens ».

2.2        La littérature syriaque

La langue des chrétiens du proche orient était le Syriaque. Comme on peut s’y attendre, le premier texte à être traduit dans cette langue est celui de la Bible. Pendant longtemps c’est ce texte syriaque qui sera le seul témoin de la langue en occident. Les premiers érudits du  XVII° et du XVIII° qui ont étudié la langue syriaque l’ont fait grâce aux textes de la Bible.

2.2.1       Etude de la littérature syriaque par les érudits occidentaux

2.2.1.1     L’abbé Eusèbe Renaudot 1646 – 1720

C’est le premier savant qui s’est rendu compte de l’importance des littératures orientales pour le texte biblique et s’intéressant par là même aux littératures orientales, il s’est aussi intéressé à l’histoire. Il était protégé par Colbert (+1683) et avec lui il avait projeté de réaliser des caractères d’imprimerie orientaux. Mais ce projet ne vit pas de suites immédiates. C’est alors qu’est constituée la première collection de manuscrits syriaques en Europe. Colbert avait dans sa bibliothèque 114 volumes qui, furent acquis par la bibliothèque royale devenue la BNF constituant le fond syriaque. A la même époque la Vaticane n’en possédait que 49. Aujourd’hui on trouve aussi des manuscrits provenant d’Egypte à la British. (Monastères des Syriens en Egypte)

2.2.1.2     La famille Assemani.

Cette famille arabe maronite libanaise est originaire d’Assrout, région de  Kalicha non loin des Cèdres.

Joseph Simon Assemani  (1687 – 1768) était préfet de la bibliothèque vaticane et archevêque de Tyr (Sour). Il publie entre 1719 et 1728 quatre volumes de la biblioteca orientalis  (1719 les Orthodoxes, 1721 les Monophysites, 1725 les Nestoriens, 1728 suite des Nestoriens)  Joseph Simon publie aussi les écrits de St Ephrem conservés en grec.

Etienne Evode Assemani (1711 – 1782) neveu de J.S. Il fit un travail important de catalogage des manuscrits orientaux. (Dans les volumes il y a souvent plusieurs œuvres cousues ensemble et les titres ne sont pas toujours écrits au début… ceux qui cherchent à faire des thèses peuvent rechercher les titres qui ne veulent rien dire..)

Joseph Aloys Assemani (1710 – 1782) Il enseigna le Syriaque et la liturgie à Rome et publie entre 1749 et 1766 le Code liturgicus Ecclesii  Il y a des anaphores plus anciennes que la messe de St Pie V : anaphore de Marie, anaphore de St Pierre, et l’anaphore des apôtres Addaï et Mari utilisée par les Chaldéens. Dans cette anaphore du II° il n’y a pas de récit de l’institution ; en 2002 la congrégation a accepté cette anaphore… (usage légitime pour les Chaldéens qui font et ne disent pas ce qu’ils disent).  Josept Aloys s’est intéressé à l’histoire des patriarches nestoriens. Il a donné des traductions en latin d’ouvrages intéressants.

2.2.1.3     Etudes suivantes

A partir du XIX° siècle, les études du Syriaque se développent ; les savants et les missionnaires voyagent. On connaît mieux les manuscrits et on les localise. Mais en même temps les possesseurs de manuscrits ne les distribuent plus et même les cachent. Ainsi la bibliothèque du patriarcat maronite n’est toujours pas accessible. Deux prélats ont joué un rôle important dans la découverte de la littérature syriaque :

Ignace Ephrem II Rahmani   (1898  - 1929), patriarche de l’église syrienne catholique. Et d’autres comme l’évêque chaldéen de Séert Mgr Scher qui a fait un travail de catalogage.

Ces manuscrits nous permettent de découvrir la vie des églises de l’orient chrétien et donnent accès à des versions syriaques des textes bibliques ; c’est important pour l’établissement du texte (voir l’aparacritique dans les éditions savantes de la bible et du NT). Il y a aussi des textes apocryphes : certains rendent compte de traditions sur la vie des églises. Des traités de théologie tant monophysites que nestoriens éclairent le débat christologique. Des manuscrits traitent de l’Histoire religieuse et profane (et politique) de la Mésopotamie. On trouve aussi des hagiographies, des œuvres scientifiques : géographie, physique, médecine, grammaire. On dit souvent que c’est par les Arabes que la science antique nous est parvenue, mais on oublie une étape : le passage par le syriaque. (ou le latin avant l’arrivée des Arabes en Espagne).

Le Karshouni  est une écriture spéciale qui a servi à écrire de l’arabe avec des caractères syriaques, cela a permis de ne pas être lu par les Mahométans. (A la BNF ces textes arabes écrit en karshouni sont rangés dans le syriaque…) Il existe aussi une littérature laïque : des inscriptions funéraires (les chrétiens se cachaient), une lettre (III°siècle) d’un philosophe stoïcien à son fils lui recommandant de dominer ses passions et de cultiver la sagesse plutôt que de s’émouvoir sur les vicissitudes de la vie (cette lettre est-elle ou non chrétienne ?…)

Les versions bibliques

L’ancien testament syriaque a été commencé au II° siècle pour l’évangélisation de la Mésopotamie. C’est une traduction du texte hébreu par plusieurs auteurs. Elle a été réalisée à partir de l’hébreu, car elle était aussi destitée à l’usage des juifs, il y avait donc des traducteurs juifs, convertis ou non. Ces versions syriaques ont des targoumim : des discussions.

Le nouveau testament est une traduction un peu postérieure, à l’origine les quatre évangiles, puis Paul, Jean, Pierre et Jacques. C’est la « Vetus syria ». Il fallut aller plus loin : Il y eut une fusion dans une version qui s’appelle « la simple »  (P^stto  en syriaque, mot du IX° toujours actuel) qui est un ensemble de l’ancien et du nouveau testament. Les traducteurs ont utilisé la version hébraïque de la bible mais aussi la Septante.

3         Les sources historiques

3.1        Fondation de l’église d’Edesse

Le récit de la fondation de l’église d’Edesse est légendaire. On le trouve dans la « doctrine d’Addaï »  (cf Alain Desleumau : Apocryphes dans la Pléiade ou la collection rouge). Eusèbe de Césarée dans l’histoire ecclésiastique se réfère à une chronique pour raconter l’histoire de Jésus avec le roi Abgar. Mais ces récits sont des anticipations d’événements qui auront lieu plus tard car c’est sous Abgar 8, le grand roi de 177 à 212, que s’est établi le christianisme dans son royaume. Eusèbe IV affirme emprunter son récit aux archives d’Edesse alors ville royale  ; il termine sa notice en écrivant : « voilà ce qui ne m’a pas paru inutile de rapporter ici et qui a été traduit du syriaque » (qui a traduit ? lui ou a t-il trouvé une traduction grecque ? ) Dans ce récit des relations entre Jésus et Abgar y-a-il des traces de vérités historiques ? Abgar ou Kama (le noir) qui était contemporain du Christ était malade. Il entend dire qu’il y a un thaumaturge du côté de Jérusalem. Il envoie son archiviste porter une lettre à Jérusalem pour dire à ce thaumaturge de venir le voir et partager son royaume, petit mais suffisant pour deux, et Jésus répond en disant qu’il a autre chose à faire mais qu’il lui enverra un disciple qui ira le soigner. Pendant que Jésus parlait à l’archiviste, celui-ci a fait un portrait du Christ (la sainte face d’Edesse icône la plus importante d’Orient). L’apôtre Thomas envoie Aggaï et Mari (Aggaï apôtre de la Syrie et Mari apôtre de la Perse). Ils vont guérir le roi. (voir le texte dans les apocryphes soit dans la Pléiade 1200 pages ou dans la collection Apocryphe n°1 chez Brepols par Alain Desreumaux 1992)

3.2        Témoignages extérieurs

3.2.1       Le royaume de l’Adiabène

Ce royaume situé dans la région des deux affluents du Tigre, les grand et petit Zab, et dont la capitale était Arbèles entretenait des relations avec Israël. Des missionnaires juifs avaient fondé des communautés judéo-chrétiennes. Deux souverains de ce royaume, Isate et Hélène, sont enterrés à Jérusalem dans le tombeau des rois. Des manuscrits en provenance de cette région ont été édités par Adolf von Hanack (luthérien) en 1930. Dans l’histoire de ce royaume on reconnaît un Peccida, évêque d’Arbèles, de 105 à 115. En 115 les campagnes de Trajan dispersent la communauté chrétienne. En 121 l’évêque Sanson est mentionné. Les évêques ont des noms hébreux tirés de la Bible. Au début du V°siècle, Sazomène, dans son histoire ecclésiastique, décrit l’Adiabène comme une région de Perse presque entièrement chrétienne. Une chronique d’Arbèles 560 – 569  renseigne sur la vie aux premiers temps du Christianisme. (cf. sources chrétiennes corpus 467 – 469 au Louvre). Le christianisme d’Arbèles s’est répandu dans les contrées limitrophes.

3.2.2       Les odes de Salomon

Quarante deux odes découvertes en 1905 dans un manuscrit syriaque montrent un apocryphe qui est d’origine juive. Elles ont été interpolées par un auteur chrétien. (cf. traduction Marie Joseph Pierre chez Brépols et à la Pléiade)

3.2.3       Tatien

L’apologiste chrétien syriaque dit « Je suis né au pays des Assyriens » sans doute vers 120 C’était un païen d’origine. De culture syrienne Tatien fut également initié aux lettres grecques. Dans un discours aux Grecs (trad. Emile Puech), il raconte sa conversion grâce à certains écrits barbares. Ces livres barbares sont des écrits juifs et chrétiens. Où s’est-il converti ? probablement à Rome où il était élève de Justin, laïc qui avait son école à Rome au deuxième siècle. Justin était originaire de Samarie. Tatien devient un contempteur de l’homme, (Justin ?) rejette la philosophie et revient en Orient où il est le meneur de l’Ankratisme. (hydroparstate ?). Il rédige un diatessaron : un seul évangile à partir des quatre  ( dia tessaron  ) Ce diatessaron devint un livre de référence qui fut traduit en plusieurs langues (mais fut-il écrit en grec ou en syriaque ?) . Saint Augustin s’est élevé contre cette mode de condenser les quatre évangiles en un seul ; il disait qu’il faut savoir reconnaître la vérité en ses nuances. Entre 360 et 370, saint Ephrem fait un commentaire ; en particulier il y dénonce des influences de l’ancien testament par exemple dans Mathieu XVI 12 « Tu es Pierre… mon Eglise, les porte de l’Hadès ne l’emporteront pas ( katiscüsousin ) contre elle »  devient dans le diatessaron « Les barres du Schéol ne lui résisteront pas (à l’Eglise) (note personnelle : la Bible de Jérusalem semble être influencée par la traduction du diatessaron).

Tatien est condamné par Rabboula, évêque d’Edesse, comme hérétique. La chronique d’Ephrem mentionne également Marcion et Bardesane comme hérétiques.

3.2.4       Marcion

Marcion deuxième siècle ; fils de l’Evêque du Pont Euxin, chrétien de deuxième génération se pose le problème de l’ancien testament : le Dieu juste est-il le Dieu d’Amour ? Selon lui, ce n’est pas le même Dieu ; l’ancien testament doit-être rejeté. A cette époque (II°) le nouveau testament n’est pas encore constitué de manière définitive. Marcion rejette Mathieu trop proche de l’ancien testament, Marc et Jean ; il garde Luc mais sans le début, à partir de IV 32 lorsque Jésus quitte Nazareth pour Capharnaüm. Il garde les épîtres de Paul. Le Marcionisme est une coupure radicale d’avec les Juifs et l’ancien testament. Il n’y a pas d’espérance des prophètes. De là provient la réaction de l’Eglise qui a affirmé sa fidélité à l’Ancien Testament.

3.2.5       Bardesane

(voir Le Coz page 114, et livre de Xavier Tesidore

Bardesane (fils du fleuve) est né le 11 juillet 154 ( !) à Hiéropolis Mabouk près d’Edesse. Il aurait participé à la conversion d’Abgar IX  premier roi chrétien d’Edesse en 206.

« Philosophe, astrologue, poète, historien, controversiste, ethnographe, et, de plus, habile archer, son oeuvre marque la transition entre la philosophie des païens et des mages, et la pensée chrétienne » (Le Coz 114).

Il fut gnostique, disciple de Valentin « dont il renouvelle les impiétés… » et devint chef de secte. Michel le Syrien, fin XII, rapporte que Bardesane a été élevé par un prêtre païen ; passant devant une église il entend expliquer les écritures et est séduit. Catéchisé, baptisé, il devient diacre. (arguments de l’Hérésiologie). Par ailleurs c’était un bon archer capable de dessiner sur un bouclier… Ces éclairages divers tendent à montrer que sa doctrine était aussi bizarre que la vie du personnage.

Bardesane dit : « Dieu est un être un et l’homme à l’image de son créateur doit tendre à l’unité. » La théologie de Bardesane est plutot une philosophie. Cette philosophie le rend suspect à l’Eglise et il va trouver un adversaire en Ephrem. Bardesane est admiré pour sa poésie ; il est considéré comme le créateur de la poésie en langue syriaque ; et son adversaire Ephrem le désigne comme un nouveau David.

A part quelques citations trouvées chez des auteurs plus tardifs, rien n’a subsisté de ses ouvrages qui comprenaient un « Dialogue contre Marcion », de nombreuses hymnes, un ouvrage sur l’Inde, une histoire d’Arménie et des livres d’astrologie. Il reste un dialogue entre Bardesane et ses disciples et un « Livre sur le destin » le plus ancien texte syriaque actuellement connu.

Sa cosmologie est singulière : le cosmos est divisé entre le monde des lumière et celui des ténèbres ; le corps qui appartient au second, es soumis aux astres… Ephrem considère Bardesane comme l’inspirateur de Mani.

Bardesane a créé la poésie syriaque. Ephrem lui attribut cent cinquante hymnes. Il le considère comme un « nouveau David ». L’auteur s’est servi de la poésie comme moyen mnémotechnique pour permettre au peuple de retenir plus facilement son enseignement religieux. Bardesanne a inventé le « madraché » : le chant respoonsorial avec un refrain repris par la foule.

Eusèbe dit que Bardesanne n’a pas réussi à se laver de son ancienne hérésie. Mais avec lui la religion chrétienne transcende tout nationalisme. Le Christianisme est une nouveauté qui peut-être confié à tous les peuples. Il sera le ciment qui à son époque unira le monde syrien.

Bardesane meut en 222 à Edesse.

3.2.6       Jules l’africain

Jules l’africain, ami d’Origène au III° siècle, dit avoir rencontré Dieu à la cour.

 

Cours du 19 mars 2003

L’Eglise d’Edesse – suite -

3.2.7       Repères historiques

En 115 ou 116 le fleuve Tigre change son lit de place à Ctésiphon. Il coule désormais entre Ctésiphon et Koké, qui devient un faubourg de Séleucie. Un texte ancien raconte que Mari est venu près de Ctésiphon près de la colline de Koké et non à Séleucie ce qui daterait d’avant 116 sa venue et permet de faire remonter l’Evangélisation de cette région au début du deuxième siècle.

A Edesse la Maison de la Congrégation des chrétiens est détruite en même temps que la ville par une inondation survenue en 201. La chronique d’Edesse raconte aussi que Quno en 313  jette les fondations de l’église d’Edesse qui sera terminé 10 ans après. S’agit-il de la même église ou d’une autre ? Y–avait–il un Christianisme hétérodoxe à Edesse en 201 ? et en 313 un Christianisme Catholique. (on n’aurait pas mis 112 pour reconstruire une église !)

Une thèse sur l’Hérésie (1934 – Walter Bauer) pose la question : « Dans le christianisme, l’Orthodoxie est-elle première par rapport à l’hétérodoxie ». Bauer prétend le contraire ; Il pense que le Christianisme des débuts était beaucoup plus divers. Chaque église avait sa propre option…  l’une des hérésies, la romaine, ayant prévalue. (en prenant le mot « hérésie » dans le sens de  « choix ». Il y aurait eut, à l’origine, des choix divers puis unification. L’église d’Edesse est emblématique de ce qu’étaient à l’origine les églises. Elle est caractéristique du Christianisme ancien ce qui explique la diversité des Eglises Syriaques. (cf il y a 4 évangiles, l’enseignement de Pierre est différent de celui de Paul. Apollos qui ne connaît que le baptême de Jean… )

3.2.8       Aphraate – Le sage Persan

Le « sage Persan », le « juge » écrit en Syriaque « les exposés » on n’y trouve pas de mention des grandes querelles du IV° siècle (arianisme…) Il reste en dehors des disputes de la christologie. (cf Marie-Joseph Pierre). Son nom connu ne serait qu’une transcription de son surnom. Bien que sa théologie soit archaïque elle est Orthodoxe.

Né païen, Aphraate, qui s’est fait moine après sa conversion, a vécu à l’époque de Chapour II, alors que Papa était évêque de Séleucie-Ctésiphon. Aphraate a rédigé vingt-trois Démonstrations appelées encore Epîtres, car elles ont été écrites sous forme de lettres à un correspondant. Elles datent de 337 à 345. Plusieurs de ces épîtres contiennent des attaques contre le judaïsme, car l’Eglise avait encore à lutter contre les coutumes juives toujours en usage parmi les chrétiens d’Orient. Aphraate reste étranger à l’influence grecque et à la polémique antiarienne. Sa seule source d’inspiration est l’Ecriture : la Peschitta pour l’Ancien Testament et le Diatessaron pour le Nouveau Testament. (tiré de Le Coz)

3.2.9       Ephrem

Ephrem le syrien était présent avec Jacques le Nisibe au concile de Nicée en 325. C’est un grand poète, et un commentateur de l’écriture. Il a écrit des œuvres théologiques importantes avec de l’exégèse, des discours sur la foi, sur les hérésies, des écrits acétiques dans la ligne de la morale syrienne de son temps comme l’hymne sur la virginité. Il a été nommé docteur de l’Eglise par l’église romaine au début du 20ème siècle. C’est un grand théologien qui a donné à son église une assise non seulement dogmatique mais aussi liturgique avec ses hymnes. Ephrem utilise la méthode de Bardesane  en écrivant des hymnes pour propager la doctrine. Il y a des traductions d’Ephrem jusqu’en Arménie. (Arius faisait pareil en faisant chanter ses fidèles)

Ephrem de Nisibe, appelé également Ephrem le Syrien est né dans une famille païenne vers l’an 306, alors que la ville venait d’être cédée à Rome. Il est converti à dix-huit ans par l’évêque Jacques, le seul « Perse » d’origine qui assiste au concile de Nicée. Quand Jovien restitue Nisibe au Roi des Rois en 363, l’Empereur vide Nisibe de ses habitants. Ephrem émigre alors à Edesse où il meurt dix ans plus tard en 373.

Son œuvre est énorme. Ephrem est à la fois le plus grand poète de langue syriaque et l’un des principaux théologiens de l’Eglise d’Orient. Pour mieux combattre les hérésies, il utilise la technique de Bardesane le « madraché et compose des hymnes à contenu théologique, ce qui permet aux assistants de bien retenir la doctrine. Les sermons d’Ephrem sont rimés. Comme Aphraate, il fait davantage figure de moraliste que de théologien proprement dit.

3.2.10  Christianisme syriaque

A partir du III° et du IV°siècle le Christianisme prend de plus en plus d’importance dans le monde syriaque. C’est à cette époque qu’apparaît la légende d’Abgar et que l’on fait remonter le christianisme syrien à la plus haute antiquité. Edesse apparaît comme la vraie capitale du monde Syrien rattaché à Antioche où la langue grecque reste majoritaire. La ville d’Antioche est la ville eucuménique. Le christianisme Syrien fut très vivant et attentif au développement du Dogme et aux querelles christologiques. Il y a une école de théologie à Nisibe. Elle est organisée comme un couvent avec une communautaire. 

3.2.11  Julien l’apostat

En 363 l’empereur Julien « l’apostat » est tué par les Perses. Empereur en 361, chrétien à l’origine il s’était reconverti au paganisme. Il avait maîtrisé les Chrétiens et favorisé les autres religions. Il avait même voulu reconstruire le temple de Jérusalem. Il avait été fait prisonnier et servait de marchepied au Roi des Rois. (voir Benoist Méchin livre sur Julien ou le rêve calciné – Perrin ) Jovien qui succède et cède Nisibe qui devient une ville perse. L’école des Perses de Nisibe se réfugia à Edesse et fonda une école très affectée par les discussions.

 (St Ephrem de Nisibe enseigne à Edesse.

3.3        Nestorius et le Nestorianisme

En 428 est nommé un évêque de Constantinople : Nestorius, moine Antiochien, excellent prédicateur (dit bouche d’or) est appelé par l’Empereur qui veut mettre de l’ordre dans l’Eglise qu’il trouve agités (il enferme les moines) il trouve dangereux de dire que la vierge est Théotokoï. Nestorius dit qu’elle est mère de Dieu et de l’homme donc il faut dire Mère de Jésus (Christotokos). Il n’a jamais dit que le Christ n’est qu’homme. Il est condamné au concile d’Ephèse en 431.

3.3.1       Le concile d’Ephèse et le Nestorianisme

Le déroulement du concile d’Ephèse avait été chaotique ; le résultat en est un schisme. Afin d’aboutir à une définition théologique acceptée par tous et pour mettre fin à la confusion, l’empereur convoque un concile qui doit se tenir à Ephèse pour la Pentecôte de 431.

Cyrille, convoqué par l’empereur pour arranger les choses, arrive d’Egypte avec une horde de moines pour faire le coup de poing. Il arrive à Ephèse avant les orientaux qui, à chameaux, mettaient plus de temps. La Pentecôte arrive, c’était la date fixée pour le concile, Cyrille ouvre le concile sans les Antiochiens ni même les légats romains de Célestin 1er . Cyrille en profite pour les condamner. Quand Jean d’Antioche est arrivé, il rouvre le concile et on condamne Cyrille. Cyrille rouvre le concile qui recondamne Nestorius et les autres. Jean d’Antioche rouvre son deuxième concile. L’empereur envoie des représentants de son administration : le comte des largesses sacrés = ministre des finances et le comte des sacrés domestiques = ministre de l’intérieur. Ils mettent tout le monde en prison : Nestorius, Cyrille et  Memnon d’Ephèse.

Deux ans plus tard une lettre, l’acte d’union est rédigé par Théodoret de Cyr. (433). Les théologiens cyrilliens trouvent que l’acte d’union fait la part belle au dyophysisme et se rebellent ; en particulier Eutychès archimandrite de Constantinople qui est un partisan de Cyrille dit qu’il faut tout rejeter du Dyophysisme. Théodore de Mopsueste « l’interprète »(+428) est le grand théologien du dyophysisme (les deux natures : humaine et divine). Eutychès se fonde sur une formulation malheureuse de Cyrille : « une seule nature incarnée du fils de Dieu » c’est le monophysisme. La nature divine est tellement forte qu’elle absorbe la nature humaine que Jésus tient de Marie au point qu’on ne voit plus que Dieu dans l’homme. Est-ce que un plus un peu faire un ? Une nature divine plus une nature humaine cela peu-t-il faire un seul homme. Théodore de Mopsueste, dans sa huitième homélie, fait une belle réponse en citant  le couple humain. En 451 le concile de Calcédoine condamne le monophysisme. Les Nestoriens et les Monophysistes se répandent dans tout le monde syriaque.

A partir de 451 il y a une très forte opposition entre les Melkites fidèle à l’empereur, les Monophysites et les Nestoriens. Le monde syriaque est divisé par ces trois grands courants qui vont faire trois églises. Ce sont les Monophysites et les Nestoriens qui sont les plus nombreux. Les Catholiques ou Calcédoniens (actuellement catholiques romains, orthodoxes et protestants).  La définition du concile de Calcédoine dit que les deux natures humaine et divine du Christ sont unies sans division, sans séparation, sans mutation, sans transformation et que le Christ est en deux natures. Et non de deux natures.  

Cette division a une grande importance dans la vie des églises syrienne. En particulier les monophysites, sous la conduite d’un moine, Jacques Baradé, qui va reconstituer au 6ème siècle l’église monophysite qu’on appelle depuis les Jacobites. L’école d’Edesse est elle-même agitée par ces mouvements christologiques.

3.3.2       Notes complémentaires (Raymond Le Coz – Histoire de l’église d’Orient)

Nestorius est le héros involontaire et la principale victime de cet épisode douloureux de l’histoire de l’Eglise. Né à Germanicie en Euphratésie, province de Syrie proche de la Perse, Nestorius rentre au couvent à Antioche où il se lie d’amitié avec Théodoret de Cyr. Prêtre réputé pour ses qualités d’orateur, il est choisi comme archevêque de Constantinople en 428, il se met rapidement à dos les habitants de la capitale de l’empire, en s’opposant à certains divertissements populaires, et s’attire également l’inimitié de Pulchérie, la sœur toute puissante de l’empereur. Enfin, les maladresses de ses formulations théologiques finissent par indisposer son entourage. Son refus de donner à Marie le titre de Mère de Dieu (théotokos) soulève l’hostilité générale et met le feu aux poudres…  

… La fougue du prédicateur qui cherche à enflammer son auditoire, à frapper les esprits par des formules chocs et un discours imagé, l’amène à ignorer les subtilités du langage théologique comme à oublier les règle de prudence imposées par un tel sujet…

Cyrille d’Alexandrie va se faire le champion de l’opposition à la doctrine de Nestorius.

Cyrille profite du scandale provoqué par la prédication de l’évêque de Constantinople pour mettre en avant ses propres thèses. Après avoir adressé au pape Célestin un rapport qu’il a pris soin de faire traduire en latin, Cyrille polémique avec Nestorius et lui fait parvenir deux lettres dans lesquelles il critique sa doctrine christologique. Cyrille reproche essentiellement à son adversaire de prétendre qu’il y a dans le Christ deux individus distincts : l’homme-Jésus, fils de Marie, et le Verbe, Fils de Dieu, puisqu’il avance que le Seigneur possède deux natures et deux hypostases réunies dans la même personne.

Nestorius prend également l’initiative d’écrire à Rome pour informer le pape de l’action qu’il mène contre l’hérésie d’Apollinaire, et expose en détail l’opinion qu’il soutient au sujet de la Mère de Dieu…Hélas ! Le malheureux Nestorius néglige de faire traduire en latin la lettre partie pour Rome, qui reste ainsi de longs mois sans être lue par son destinataire.

3.3.2.1     Le Brigandage d’Ephèse

Le choix de la ville est peu judicieux : c’est un centre de piété mariale ; on ne saurait y débattre en toute sérénité de la maternité divine de Marie, à laquelle l’ensemble de la population est très attaché.

Les évêques de Syrie sont arrêtés en route par une crue de l’Oronte. Cyrille prend l’initiative d’ouvrir le concile le 22 juin, sans eux et en l’absence des légats du pape, retardés eux aussi. Les délégués de l’empereur, chargé de contrôler le bon déroulement des travaux veulent s’opposer à ce coup de force et sont expulsés de la salle du concile. L’assemblée se trouve ainsi composée exclusivement des partisans de Cyrille. Nestorius est condamné. Dès leur arrivée, les partisans du dyphysisme tiennent un contre-concile. Il condamne à leur tour Cyrille et son complice, l’évêque d’Ephèse. Le concile de l’union se termine donc par un schisme.

L’empereur finit par déposer et emprisonner les trois fauteurs de troubles : Memnon, Cyrille et Nestorius.

Finalement, en 433, les deux parties se mettent d’accord sur un texte de compromis qui reprend pour l’essentiel, la profession de foi soutenue par les évêques syriens à Ephèse. Mais Cyrille obtient la condamnation de Nestorius.

Plus tard les acteurs du drame ont disparu à l’exception de Théodoret de Cyr, Eutychès supérieur de monastère à Constantinople ranime les querelles. Il est le véritable fondateur de l’ « hérésie »monophysite.

3.3.2.2     Le concile de Chalcédoine (451)

La mort de Théodose II qui survient en juillet 450, annule les effets du « brigandage » et entraîne la réunion d’un nouveau concile en 451, à Chalcédoine, près de Constantinople. L’acte le plus important du concile de Chalcédoine reste la proclamation de ce qui deviendra la formulation définitive du dogme de l’incarnation : « Un seul et même Christ Fils, Seigneur, Monogène, sans confusion, sans mutation, sans division, sans séparation, la différence des natures n’étant nullement supprimée par l’union, mais plutôt les propriétés de chacune étant sauvegardées et réunies en une seule personne (prosopon) et une seule hypostase. »

Le concile de Chalcédoine ouvre une longue période de crise qui va durer tout le VI°siècle.

3.3.2.3     Le monophysisme

C’est Sévère, patriarche d’Antioche en 512 qui est le fondateur du monophysisme tel qu’il s’est perpétué à travers les siècles en refusant les termes du concile de Chalcédoine au sujet des deux natures dans le Christ et reprenant à son compte le vocabulaire de Cyrille pour qui le mot phusis (personne) est synonyme d’hypostase.

Le monophysisme de Sévère est purement formel, contrairement à celui d’Eutychès, et peu de chose, excepté une question de vocabulaire, le sépare de l’orthodoxie.

3.3.2.4     L’Eglise Jacobite

C’est Jacques Baradée qui va sauver le monophysisme et l’organiser en véritable Eglise. Consacré évêque monophysite d’Edesse en 542 Jacques passe sa vie à parcourir la Syrie-Palestine et l’Egypte à reconstituer la hiérarchie de son parti.

 

3.3.3       L’école d’Edesse

A Edesse, à partir du 4ème et au 5ème siècle, on est plutôt Dyophysite (Nestorien). Mais au 5ème siècle Rabboula d’Edesse va vouloir écarter le dyophysisme et préconiser le monophysisme. Philoxène de Mabbug devient le grand nom du Monophysisme de l’école des Perses. Quand les Monophysites  imposent leur doctrine, les Nestoriens, une partie de l’école, repartent à Nisibe chez les Perses avec Nassai 437. Nisibe devient le foyer de la doctrine dyophysite et contrecarre les monophysites d’Edesse. L’empereur Zénon le prend assez mal et ferme l’école d’Edesse en 489.

Rabboula (+435) entrepris de réviser le texte de l’ancien testament syriaque à la lumière de la Septante et pour le nouveau testament il compare les anciennes versions syriaques dont le diatessaron. Il aboutira à la Psitto (la simple ou Peschitta) qui est la bible en langue syriaque. Cette Bible est un élément d’unité et de propagande. L’église de Nisibe ensuite de développe. Elle a des théologiens très instruits et se propage en Perse.

( Au moment des conquêtes arabes les musulmans se trouvent devant des chrétiens divisés. Les monophysites qui ont perdu leur culture ne vont pas combattre les musulmans ils vont plutôt traduire les anciens. On trouve un évêque, Georges des Arabes, évêque des tribus bédouines, qui traduit Aristote en Arabe. Alors que les Nestoriens vont combattre l’Islam. Ils vont avoir une littérature de combat, apologétique et mieux résister. La plupart des arabes convertis à l’Islam viennent des églises monophysites ; parcequ’ils ont beaucoup moins bien résisté que les nestoriens. Les Nestoriens constitueront ensuite une grande église en Perse.)

3.4        L’église de Perse

3.4.1       Les origines de l’église de Perse

L’église de Perse, de langue syriaque, revendique une origine très ancienne. Ils se disent venant des rois mages ou de Thomas. Les actes de Mar Mari (Brépol N°11) racontent la mission d’évangélisation de la Perse. Quant on regarde les noms des évêques de Séleucie–Ctésiphon, on remarque qu’ils sont sémitiques. Et donc ont une origine d’Edesse. (A la Pentecôte il y a des édomites. Sozomène, historien de Constantinople, dit que c’est d’Osrhoène que le christianisme vint à Ctésiphon.

3.4.2       La déportation des Syriens en Perse

En 260 l’empereur Valérien est battu par Chapour 1er et fait prisonnier. Il termine sa vie comme tabouret ; le grand roi le faisait mettre à quatre pattes pour monter sur son cheval. La défaite était terrifiante pour le monde romain. (cf. un camé à la BN cabinet des médailles – le grand roi tient de sa main le bras de l’empereur romain). Le grand roi déporte des populations de Syrie et les emmène au sud de son grand empire à Beit Laphat pour développer cette région. Ils fondent la ville de Gondéchapour. La plus part des déportés sont chrétiens venant d’Antioche et de la région de l’actuel Liban. Ils reconstituent leur église ; ce sont des communautés inorganisées qui ont tout de même des évêques déportés avec eux. (un récit du martyre de deux évêques existe)

 

A la fin du 3ème  L’évêque Mar Papa conçoit le dessin de fédérer les chrétientés de Perses sous l’hégémonie du siège de Ctésiphon. Il affirme être le délégué des Perses occidentaux. Il y a dans cette église de Perse une très forte influence de la Syrie, de l’église d’Edesse qui est regardée comme l’église mère. Devant l’autoritarisme de Mar Pappa des évêques vont s’opposer en particulier Siméon. Pappa est accusé de prévarication, d’orgueil démesuré, de manipuler les synodes, de ne pas respecter le droit ecclésiastique et de mœurs honteuses. Un synode est réuni et Pappa essaye de se disculper, il est déposé et Siméon Barsabé prend sa place. Les syriens remettent Pappa sur le siège mais en assurant que Siméon lui succèdera. Ce Siméon aura un destin exemplaire. Ce Christianisme perse de langue syriaque souffre du fait qu’il est regardé par le grand roi comme soumis à l’empire romain. Les Sassanides persécutent les Chrétiens de Perses pendant toute la durée des guerres qui mettent aux prises la Perse à l’empire romain. (338-387). Constantin avait été maladroit en écrivant à Chapour qu’il avait des protégés en la personne des Chrétiens. Chapour ordonne que Siméon chef des Nazaréens soit arrêté et ne soit relâché que «  s’il verse une capitation double et un double tribu pour tout le peuple des Nazaréens, car ils habitent notre territoire et partage les sentiments de César notre ennemi » Sozomène raconte l’arrestation de Siméon :

«  Les mages, avec le concours des juifs, détruisirent avec empressement les églises. Siméon fut saisi et traîné chargé de chaînes devant le roi ; mais là il se conduisit en homme de grand mérite et en brave ; en effet quand Chapour ordonna qu’on l’amène pour qu’il fut torturé ni il eut de crainte ni il ne fit le geste d’adoration. Sur quoi fortement irrité Chapour lui demanda : Pourquoi donc ne t’ais tu pas prosterné aujourd’hui alors que tu faisais ce geste auparavant ? Siméon répondit : Parce qu’au pararvant je n’étais pas trainé en justice comme prisonnier pour que je trahisse le vrais Dieu et sans me distinguer en rien des autres je suivais les usages reçus touchant la magesté royale. Mais aujourd’hui il ne m’est pas permis de le faire car je viens soutenir un combat pour la défense de la piété et de notre doctrine. Sur ces mots le roi l’engagea à adorer le soleil et s’il obéissait le roi lui promettait de lui faire de grands dons et de le tenir en honneur et s’il désobéissait le roi le menaça de le faire périr lui et tout le peuple de Chrétiens. Comme ni il le frappait par ces menaces ni il ne l’amollissait par ses promesses, mais que Siméon continuait à soutenir courageusement qu’il n’adorerait jamais le soleil et ne se montrerait pas traite à sa religion, le roi ordonna pour l’instant de le laisser dans les chaînes ; il se dit que probablement Siméon changerait d’opinion  » En fait Siméon tint bon, il refusa de payer la double capitation et le double tribu mais en protestant de son loyalisme et mourrut martyre en 354.

La persécution durera quarante ans dans tout l’empire ; il y eut de nombreux martyres. Simon mourut martyr ainsi que ses deux successeurs.

Sous Chapour 3 c’est la trêve qui permet aux églises de se reconstruire ; et en 410 c’est le concile national de Séleucie qui réuni 40 sièges en 5 provinces. Des écoles sont prévues, la formation du clergé est organisée. Cette église de Perse qui se rétablie tire les leçons de ce qui s’est passé; elle va essayer de satisfaire le souverain perse. Le principal artisan de cette restauration chrétienne perse de langue syriaque, est l’évêque Markutha de Maïphercata (ville frontière Martyropolis) Il participe à plusieurs ambassades, séjourne à Antioche et même à Constantinople ; il installe sur le siège de Séleucie en 408  l’évêque Isaac le grand qui convoque le concile en 410. Markutha a l’oreille du grand roi. Les Mazdéens étant devenus trop puissant le roi équilibre les pouvoirs.

L’église de Perse est alors prête à de grandes choses. Les missionnaires partent vers l’Est. Il y a évêque à Barhein. La civilisation syriaque chrétienne se propage en Asie.

3.4.3       Extension vers l’orient de la chrétienté perse

Eusèbe de Césarée dit qu’il a eut des chrétiens en Inde dès le 2ème siècle. Panthène qui était le didascalène d’Alexandrie en 190 est allé en Inde et y a trouvé l’évangile de Mathieu en langue  araméenne (apporté par l’apôtre Barnabé ?). Cela n’est pas étonnant car l’Inde est sur les routes commerciales de la soie et des épices. Dans le sud de l’inde venant par l’océan indien, et par la route de terre au  nord de l’inde, on trouve des chrétiens qui ont une liturgie de langue syrienne.

L’Evêque de Ctésiphon au 4ème siècle a envoyé un marchand Mar Thomas pour réformer les communautés chrétiennes et mettre en place un système social (il y a eu confusion entre ce Thomas et l’apôtre Thomas). Au 5ème siècle l’emprunte de l’église syriaque se confirme quand le prêtre indien Daniel aide le traducteur syrien Marc Omaï à la traduction en syriaque du texte biblique.  L’évêque Mana de Rewardachir (sur le golfe persique) en 470  envoie aux indes les œuvres de Diodore de Tarse et de Théodore de Maupsuestre. Il envoie les ouvrages d’auteurs dyophysites. La théologie nestorienne commence à se répandre. La plus ancienne mention d’une mission planifiée en Inde est la chronique de Séerte (13ème siècle). Elle nous dit que sous les évêques de Séleucie Charlapa et Pappa, l’évêque de Bassora va en Inde et converti de nombreuses populations.

Entre 520 et 525 un voyageur nestorien appelé Cosmas Indicopleustès (plo=naviguer)(Sources chrétiennes n°141) marchand navigateur, se rend en Inde et écrit un ouvrage appelé la Topographie chrétienne. Il raconte qu’il a rencontré des Chrétiens en Inde.

« A Traprobane, île de l’inde intérieure, là où se trouve la mer indienne, il y a une communauté, une église de chrétiens, un clergé et des fidèles.  J’ignore s’il en existe plus loin. Pareillement dans la contré qu’on nomme Malais où pousse le poivre et au lieu appelé Kaliana,  il y a même un évêque ordonné en Perse ; pareillement dans l’île nommée Dioscoridès, située dans la mer indienne et dont les habitants, des colons établis par les Ptolémées successeurs d’Alexandre de Macédoine parlant grec, il y a des clercs ordonnés en Perse et envoyés dans ces régions, une multitude de chrétiens…

Cosmas fait l’expérience d’une église de Perse qui se répand partout et qui garde des liens avec la Perse. Il y a un tombeau de St Thomas à l’île Thomé, mais il existe aussi ailleurs comme à Edesse d’autres tombeaux de St Thomas.

Au 7ème siècle, le catholicos Ichoiab 3 (don de Jésus  écrit au Métropolite Siméon  au sujet des indes : il doit surveiller les communautés de l’Inde.

Au 8ème siècle, Thimoté 1er (Bagdad) fait de l’Inde une Métropolie il y nome un archevêque.

Au 9ème siècle le métropolite des Indes, Théodose, s’excuse de ne pas pouvoir assister au synode en raison de son éloignement : l’évèque est en relation réelle avec l’église de Perse.

Ce christianisme nestorien a survécu mais il a reçu une influence monophysite une branche devient monophysite et l’autre s’unie à Rome. Les Portugais ont latinisé plus ou moins l’église et les églises protestantes sont venu s’implanter. Dans le Kerala il y a beaucoup de chrétiens mais souvent de langue syriaque pour la liturgie.

L’église de Perse qui continue à avoir des relations avec Edesse et les églises occidentales envoie des missions vers la Chine.  Au 5ème siècle en Bactriane les Huns blancs hesftalites sont convertis en 498. et demandent un évêque en 549. A Samarkand, il y a un évêque à la fin du 6ème siècle.

En 779 une stèle est érigée en Chine à Si-ngan-fu à l’occasion d’une assemblée dans un monastère nestorien fondé en 638. Elle est écrite en chinois avec des noms syriens écrits en syriaque. (Le Coz pg. 244). Elle nous renseigne sur l’organisation d’une communauté chrétienne en Chine. Cette stèle a un moulage au musée Guillemet à Paris. Le texte ressemble à un Credo. Le nom de Dieu est Allo nom de Dieu en Syrien…(texte dans la revue Istina N°2 1995 dans la revue des dominicains du Sauchoir)

Sous le catholicos Timothée 1er fin du 8ème tout l’orient est ouvert à l’activité des chrétiens, une volumineuse correspondance est échangée entre les missionnaires et Séleucie. Il y a des évêchés jusqu’en Chine et on dit même qu’il y en a au Tibet. Ces évêchés orientaux sont reliés directement au catholicos sans l’intermédiaire des métropolites par peur des divergences. La correspondance se fait en syriaque ainsi que la liturgie.

En 1281 les évêques nestoriens élisent un moine mongol chinois comme catholicos à Bagdad : Yabb Alaaha 3 (Dieu donné) . Parmi les populations de l’empire de Chine il y avait des chrétiens de toutes races. Yabb Alaaha a des relations avec ces diverses populations. Les Mongols viennent s’installer à Bagdad en 1258. Il y a des chrétiens nestoriens parmi les Mongols, les otages et les femmes de la cour. Yabb Alaaha3 est choisis pour être l’ambassadeur du roi mongol auprès de du roi d’Angleterre Edouard 1er et du roi de France Philippe IV LeBel, proposant une alliance pour écraser l’ennemi commun : les musulmans de Jérusalem. Cette alliance a été refusée par l’occident qui renvoie l’ambassadeur dans ses états. Le roi mongol est déçu et se converti à l’Islam et l’église décline ensuite. Tamerlan (1405) persécute les chrétiens. Les chrétiens se réfugient en Adiabène, au Kurdistan et dans le sud de l’Inde. Le christianisme syriaque continue uniquement dans ces régions et à partir de 1450, le catholicos nestoriens est toujours choisi dans la même famille ils s’appellent Simon. Ce n’est que récemment qu’une révolution synodale a élu l’actuel patriarche Mar Denkha IV grande figure eucuménique de l’église actuelle.

Les Jacobites ont continué d’exister.

Raphaël bidawid est le patriarche des catholiques

Ephrem 40 – Zaka 1er : patriarche des Syriens orthodoxes

Spheïr : patriarche Maronite Monothélite dont l’eucharistie est en syriaque.