HISTOIRE DU PROCHE ORIENT 2004-2005

Ethiopie - Cours de Mr. Pérès

Histoire de l’Ethiopie n°3

3 Le Christianisme éthiopien

Introduction : Il y a 30 ans un journaliste a demandé à un évêque éthiopien quand le Christianisme est arrivé en Ethiopie. Il répondit : Le Christianisme est arrivé avec Salomon !
L’éthiopien d’Actes 8 est en fait un nubien, envoyé de la reine Kerdas du royaume de Méroé.

3.1 Les débuts du Christianisme en Ethiopie

3.1.1 Point de vue archéologique

Le croissant disparaît en faveur d’une croix. Abandon des dieux archaïques.
Le roi Esana au début du IVème siècle est le premier roi chrétien d’Ethiopie avec lui sur les monnaies le croissant disparaît en faveur d’une croix. De même les stèles sont caractérisées par l’abandon des dieux archaïques. Il y des traditions comme celles relatées par l’historien de l’Eglise Rufin d’Aquilé, compagnon d’étude de St Jérôme. Rufin et Jérôme s’étaient fâchés. Jérôme rencontra plus tard Origène. Rufin avait décidé de reprendre le récit de l’histoire ecclésiastique d’Eusèbe et de la continuer. Il traduit en latin le texte grec tout en l’amplifiant. Il raconte comment un philosophe syrien originaire de Tyr, Mérope, était parti en voyage pour l’Inde intérieure avec deux élèves, l’un Frumence et l’autre Edèse. En cours de route il faut se ravitailler. Au cours d’une de ces escales les habitants massacrent les voyageurs sauf les deux jeunes. Ils sont offerts en cadeau au roi qui en fait des compagnons de jeu de son fils. A l’avènement de ce dernier comme roi, ils sont protégés par lui et obtiennent des places importantes à la cour. Ils convertissent alors au christianisme le roi Ezanna qui libère les deux jeunes. Edèse revient en Syrie et voit Rufin qui relate son histoire dans « l’histoire ecclésiastique ». Frumence va à Alexandrie (vers 340) où il rencontre Saint Athanase et lui demande d’envoyer des prêtres en Ethiopie pour convertir tout le peuple. Athanase décide plutôt d’ordonner Frumence évêque pour l’Ethiopie. L’évêque d’Axoum restera le seul évêque en éthiopie pour ordonner des prêtres et ne pourra jamais ordonner des évêques puisqu’il faut trois évêques pour ordonner un évêque. Ainsi l’église d’Ethiopie dépend du patriarcat d’Alexandrie.

3.1.2 Le concile de Chalcédoine - 451- Les querelles christologiques.


Le concile dit que divinité et humanité sont en Christ. Les monophysites protestent et se séparent de Chalcédoine. En 451 les Arméniens étaient absents. Les Alexandrins sont opposés à Constantinople, disent que c’est la revanche des Nestoriens et se séparent. L’évêque de Constantinople prétendait avoir la deuxième place dans l’Eglise après celui de Rome
Les empereurs Justin puis Justinien hésitent à trancher…
- Les neuf saints et la ré-évangélisatin de l’Ethiopie
A la fin du cinquième siècle, neuf saints romains (syriens) venant de Constantinople et d’Antioche passant par l’Egypte viennent en Ethiopie re-évangéliser le pays. Ils fondent des monastères. Le principal est « Za Mikael Aragawi » (Saint Michel l’ancien) (Za : déterminatif). Aragawi décide de détruire un sanctuaire païen sur un plateau où l’on vénère le Serpent. Pour monter sur le plateau, le saint dompte le serpent qui devient corde à nœuds… Il transforme le sanctuaire en Eglise. D’autres sanctuaires passent du paganisme au christianisme. Les campagnes sont converties ; non seulement ces neuf saints convertissent mais ils enseignent. Ces saints syriens sont monophysites (Jacobites opposés à Justinien). Beaucoup de textes en Ethiopie sont traduits du Syriaque en Ethiopien, en particulier les apocryphes et le Carélos ? . L’Eglise d’Ethiopie tient sa catéchèse autant de la Syrie que de l’Egypte.
Saint Yarèd le mélode … récits légendaires…Il apprend la manière de chanter au ciel…Il met au point la liturgie de l’église éthiopienne.
- Liturgie Ethiopienne
On trouve non seulement des prêtres mais aussi des ministres non ordonnés, les Daptaras, qui sont chargés de l’improvisation de poèmes chantés sur les textes du jour, (il faut que ça rime). Les plus doués des daptaras sont promus à la cathédrale… Les instruments de musique qui rythment les chants sont : le bâton, le tambour à deux extrémités et le cistre. Les prêtres et les daptaras dansent devant l’autel.

3.1.3 Christianisation de la Nubie


Au 4ème et au 5ème siècles, l’Egypte s’intéresse à la christianisation de la Nubie. En 362 le siège épiscopal est à Philae, l’évêque est nommé responsable de la christianisation de la Nubie. Au milieu du 6ème siècle, l’évêque de Philae (525) Théodore et le prêtre Julien sont envoyés par l’impératrice Théodora voir ce qui se passe en Nubie (histoire racontée par Jean d’Ephèse). Le roi des Nobad est baptisé avec son peuple et entre ainsi en relation avec Alexandrie (monophysites). Les Makorites (les gens du milieu) dans les années 570, vont recevoir une influence des chrétiens calcédoniens venant de l’empire. Les Allodes du sud reçoivent une influence combinée des Byzantins et des Ethiopiens (Axoumites) et en 580 les Allodes se convertissent.
Des églises se mettent en place avec même des évêchés.
Pour les Nubiens la christianisation signifiait aussi une influence politique et une protection.
Au 7ème siècle les musulmans s’étendent en Afrique et les églises nubiennes disparaissent.
Dès le X° siècles les musulmans qui ont gagné la Nubie en écartent le Christianisme.

3.2 Le temps des luttes

Avec l’établissement de la dynastie salomonienne, l’église prend du poids mais est soumise à des dissensions.

3.2.1 Dissensions internes

Une réforme religieuse importante est entreprise par le roi Zar’a Yâ’eqob (semence de Jacob) 1434-1468) C’est un écrivain qui a beaucoup écrit. Il a fait des liturgies (onction des malades plus courte…) Sous ce roi, l’œuvre de saint Yared, auteur de la liturgie Ethiopienne, trouve son importance. Cette liturgie fait une grande part aux chants d’accompagnement qui auraient, dit-on, été entendus par Yared au ciel. La liturgie éthiopienne se distancie de la liturgie alexandrine.
Le roi Zar’a Yâ’eqob a utilisé la figure de Yared pour asseoir une liturgie autochtone. Pendant son règne il se faisait appeler Constantin.
A cette époque il y avait plusieurs tendances dans l’église.
Les Eustatéens, du nom du moine Eustat, prônaient l’observance des deux Sabbats : le sabbat juif et le sabbat chrétien. Ils observent les traditions vétérotestamentaires. Les monastères ont imposé cette observance et Zar’a Yâ’eqob l’a finalement acceptée.
Les Stéphanites sont persécutés car ils ne voulaient que la seule adoration du Dieu unique et trine. Ils vénéraient la sainte Trinité et rejetaient toute autre pratique par crainte de faire croire en d’autres dieux. Pas de vénération de la croix, pas de vénération de saint. Zar’a Yâ’eqob brise la résistance des Stéphanites. Il vénère bien sûr la Trinité mais favorise les autres rites populaires.
Les Mikaelites parmi ces trois tendances étaient les plus spiritualistes. Ils affirmaient que le père, le fils et le saint Esprit n’avaient qu’une seule apparence car dans la Bible, l’histoire de la création de l’homme dit qu’il a été créé à l’image de Dieu et non semblable aux images des personnes de la sainte Trinité. Dieu seul connaît Dieu et l’homme ne le connaît pas. A cause de cela, ils ont été considérés comme anti-trinitaires en insistant trop sur l’unité. Ils sont aussi considérés comme judaïsants.
Le roi Zar’a Yâ’eqob rédige des textes liturgiques et fait des réformes pour que l’église d’Ethiopie soit telle qu’il la veut : une église au service de la nation.

3.2.2 D’autres luttes

Luttes contre les musulmans mais aussi résistance aux Portugais.

3.2.2.1 L’empereur Claude

L’empereur Claude règne de 1540 à 1559. Il écrit « la confession de Claude » où il défend la foi et les usages de son église nationale. En effet à cette époque les Portugais veulent convertir le roi. Mais la défense de l’église nationale est aussi une manière de se défendre contre l’islam. Les musulmans qui étaient nombreux dans le Harar et le long des côtes disaient que les Portugais étaient des étrangers envahisseurs et des infidèles. Il fallait montrer que le christianisme éthiopien était autochtone. En 1558 ou 1559 l’empereur Claude aurait été tué par le sultan de Harar.

3.2.2.2 L’émir Gran

C’est une histoire dramatique que celle de l’émir Gran (gragne = le gaucher) qui attaque l’Ethiopie et est près de vaincre l’empire ; il était appuyé par la flotte ottomane qui tenait la Mer Rouge. Il brûle tout ce qu’il trouve de chrétien ; c’est le deuxième autodafé. C’est ainsi qu’il ne reste presque plus de manuscrits anciens et que les plus anciens sont du XVIème siècle. Après l’affaire de Gran, il a fallu reconstituer les textes. Gragne fut tué au cours d’un combat contre Claude allié aux Portugais. (Christophe de Gama, fils de Vasco de Gama, chef des Portugais, avait été tué peu de temps auparavant.)

3.2.2.3 Sarsatengul ( ?) 1553 1597

Le roi qui suit Gran reprend la démarche de Zar’a Yâ’eqob pour redonner à l’église d’Ethiopie ses textes et sa liturgie.

3.2.2.4 Pedro Paez

Pedro Paez, jésuite espagnol, était venu avec les Portugais. C’est un érudit modéré et il use de son influence sur l’empereur Sousanyas (1607-1632) qui se convertit au catholicisme romain. Les Ethiopiens sont déconcertés et finalement Sousenyos doit abdiquer. Son fils Facilidas lui succède et revient au Christianisme éthiopien ; il transporte la capitale à Gondar pour marquer le changement. Toutes les relations avec les Portugais doivent être oubliées. A cette époque on voit donc l’importance du Christianisme occidental qui cherche à prendre pied en Ethiopie.

3.2.3 Epoque moderne et contemporaine

C’est le moment où l’église d’Ethiopie continue de se développer. Des églises occidentales s’installent avec des capucins Italiens. Avec l’empereur Haïlé Sélassié l’Eglise d’Ethiopie cherche à se séparer du siège alexandrin. Jusque là le fait qu’il n’y eut qu’un seul évêque nommé par Alexandrie faisait qu’il y avait dépendance vis à vis du métropolite puisqu’il faut trois évêques pour en consacrer un autre. De plus cet évêque était un Egyptien parlant arabe dont Alexandrie voulait se débarrasser en conséquence il était incompris de ses subordonnés. Haïlé Sélassié parvint à faire ordonner par le métropolite plusieurs évêques autochtones. En 1959 le métropolite devint patriarche. L’Eglise Ethiopienne devint autocéphale.
Formellement l’empereur n’était pas le chef de l’église éthiopienne mais il avait une grande importance du fait même qu’il était descendant de Salomon. Il était très respecté de l’église et il portait le titre de « Lion vainqueur de la tribu de Juda »
Les Musulmans continuent à se développer en Ethiopie. Le Harar devient de plus en plus musulman.
Dans le sud les peuplent animistes se propagent vers le nord.
Recensement de 1980
52,5% d’orthodoxes
31,4% de musulmans
11,4% d’animistes
3,8% de protestants
0,7% de catholiques
0,1% de Falachas (« vagabonds »)

3.2.4 Les Falachas.

Qui sont-ils ? Le terme est inapproprié, il signifie « vagabond », « sans terre ». Eux même se désignent comme « La maison d’Israël »(Beta Israël) Ils se considèrent comme des tribus perdues d’Israël, d’autres comme des colonies juives venues d’Egypte. D’aucuns encore disent que ce sont des Juifs yéménites puisqu’ils y avaient des liens entre le Yémen et l’Ethiopie ; des populations judéo-chrétiennes, en particulier, ont pu venir au 3ème siècle. Aujourd’hui la critique historique pense que c’étaient des populations chrétiennes devenues juives au 16ème siècle sous certaines influences. Ils ne parlent pas du tout l’hébreu, ne reconnaissent pas les rabbins ainsi que les pratiques actuelles de la religion juive ; par contre ils tiennent beaucoup à l’Ancien Testament en insistant sur les rites : les ablutions, les lois de la Kaschrout sur la nourriture, le sabbat. A une période de guerre le gouvernement israélien par ses autorités religieuses, le grand Rabin Sépharade, a accepté leurs demandes de nationalité israélienne en 1973. Le grand Rabin Askhénase a accepté en 1975. En 1985 l’opération « Moïse » consistait en un pont aérien amenant les Falachas en Israël. En mai 1991 l’opération « Salomon » répéta l’évacuation (14200 personnes en 48 heures). Peu de Falachas ont une position enviable en Israël ; ils ont du mal à s’intégrer.

3.3 L’église orthodoxe

3.3.1 L’Eglise Tewâhedo

L’église éthiopienne se nomme elle-même « Tawâhedo » église de l’unification (érad = 1) Les deux natures du Christ ne font qu’un.
Catéchisme : voir texte.

3.3.2 Les fêtes

L’église éthiopienne utilise le calendrier Julien de Jules César. L’année est divisée en 12 mois de 30 jours plus un mois de 5 ou 6 jours. L’ère éthiopienne ne correspond pas à la nôtre : il y a 8 ans d’écart.
Pâques, Ascension, transfiguration, baptême du Christ, noces de Cana…
Fêtes de la vierge : naissance de Marie, cerate de Marie, pacte de miséricorde, Assomption…
Fêtes de la consécration des églises mariales.
Certaines fêtes annuelles sont célébrées par des rassemblements qui durent plusieurs jours.

3.3.3 L’église d’Ethiopie fait attention à l’exigence

Ils y a des écoles secondaires où sont séparés garçons et filles. : volonté d’éducation.
Apprentissage de l’Amraïte et du Guez, des chants liturgiques.

3.3.4 Clergé

Monachisme très développé. Moines célibataires.
Les daconos : novices
Les depteras : savants qui connaissent les textes sacrés et enseigne le guèze
Les kes : prètres

3.4 Annexes

3.4.1 Les controverses théologiques et les schismes

A la suite du Concile de Chalcédoine, l'Eglise d'Ethiopie fut entraînée à adhérer à des doctrines dont elle n'avait q'une connaissance limitée et plus particulièrement à la doctrine monophysite à la suite de l'Eglise Copte d'Egypte de laquelle elle dépendait alors. Les ermites, en Ethiopie appelés Tsadkan, c'est-à-dire les Justes ainsi que les Neuf Saints participaient à l'évangélisation de la région nord de l'Ethiopie, bref de la campagne axoumite.
Ainsi, les chrétiens d'Ethiopie admirent les décisions du concile de Nicée en 325, puis encore celles du Concile de Constantinople en 381 et d'Ephèse en 431 alors qu'ils refusèrent la doctrine dyophysite du Concile de Chalcédoine en 451 affirmant que le Christ possède deux natures distinctes: la divinité et l'humanité. D'où le nom de monophysites, selon lequel le Christ n'aurait qu'une seule nature la divinité parfaitement unie à celle de l'humanité. Toutefois, les Ethiopiens refusent d'être appelés monophysites et préfèrent le terme de myaphysites qui est la traduction du terme éthiopien Tewahido, signifiant unité.
Le clergé disputait à de nombreuses reprises ces distinctions théologiques qui finalement n'ont eu que peu de répercussions sur la piété populaire. La conséquence de l'adoption de cette doctrine chère à l'Eglise copte d'Egypte est le renforcement de l'Eglise Ethiopienne avec cette dernière.
La reconnaissance de la doctrine myaphysite, ou pour nous la doctrine monophysite, ne suffit pas à définir le christianisme éthiopien. Ce christianisme présente des particularités très surprenantes qui ne sont pas encore toutes expliquées ( par exemple d'où vient la circoncision?) La judaïsation de l'Ethiopie semble avoir eu lieu dès le premier siècle de notre ère vu l'importance des éléments d'origine hébraïque apparaissant dans le christianisme éthiopien.

3.4.2 Les conciles


Concile de Nicée : 325
Concile d’Ephèse : 431 contre Nestorius, personnalité :Cyrille d’Alexandrie
Concile 2 d’Ephèse : 449 (brigandage d’Ephèse) contre Eutychès
Concile de Chalcédoine : 451 Condamnation d’Eutychès. (Hypostasis - les 2 physis)



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