Notre Dame du Travail

Origine de son architecture

Fragment d’article trouvé dans un vieux dossier. Sans référence ni auteur, l’intérêt de cet article réside dans les larges citations de la lettre d'un vice-président de l'Union fraternelle du commerce et de l'industrie.
    

• Pourquoi une « basilique » ?

     … M. SOULANGE-BODIN fut donc nommé curé de la paroisse de Plaisance avec mission de construire une église, son prédécesseur ayant déjà acheté le terrain nécessaire grâce à un don considérable offert par une personne amie de la famille du nouveau pasteur.
     Quelques jours après son Installation officielle, le curé reçut une lettre, signée de l'un des vice-présidents de l'Union fraternelle du Commerce et de l'Industrie, qui l'inspira :
     « Si vous placiez votre église à édifier sous le vocable de Notre-Dame du Travail, réservant un pilier à chacune des profes¬sions industrielles ou commerciales, suivant les anciennes corporations ? »
     « Sur chaque pilier seraient sculptés et peints les emblèmes ou les armes de ces corporations avec indication au-dessous, en lettres capitales, de leur nom. Je crois que vous trouveriez ainsi des ressources pour des piliers, et davantage. Dans votre quartier, ce vocable ferait bon effet, et du bien. Un ouvrier entrant dans l'église, verrait un enseignement : que sa profession a un saint patron, qu'elle a eu une corporation et des armes. »
     Il s’agit d'honorer la dignité du travailleur et dans l'esprit de M. SOULANGE-BODIN, qui s'enthousiasme tant pour ce projet qu'il lance à travers la France, par cent mille prospectus, une campagne avec souscription populaire pour « l'érection à Paris d'un sanctuaire universel», il ne s'agit pas moins que de « la réconciliation du capital et du travail ». La publicité proclame :
     « Pourquoi une église ? pour unir sur le terrain de la Religion les travailleurs de toutes les classes. Pourquoi à Paris ? parce que Paris est considéré à juste titre comme le centre du travail et de l'Industrie. Pourquoi dans le quartier de Plaisance ? parce que c'est un faubourg composé uniquement de travailleurs, qui n'a pas encore d'église pour ses 35 000 habitants, mais qui est admirablement préparé à en recevoir par un ensemble remarquable d'oeuvres religieuses et sociales. »
     « Pour quand? pour 1900. Il faut qu'en venant à l'Exposition universelle, les travailleurs des deux Mondes puissent venir prier dans le sanctuaire de la Vierge du Travail. Il faut qu'en 1900, tandis que s'ouvrira le Palais des produits du travail, s'ouvre pour les produc¬teurs du travail un grand Sanctuaire d'union et de concorde. »
    

• une église originale

     Probablement séduits par les nouvelles techniques et l'audace de la Tour de M. Eiffel (1889), M. SOULANGE-BODIN et son architecte, M. ASTRUC, adoptent un style résolument moderne : « Pierre à l'extérieur, mais fer à l'intérieur. Nos ancêtres n'avaient que la pierre et construisaient d'énormes piliers qui empêchent de voir l'autel et la chaire ; nous aurons désormais de légères colonnes en fer qui se termineront en fines nervures comme les feuilles de palmiers. »
     « L'Église devait rappeler à l'ouvrier son usine afin qu'il se sentit chez lui, dans son milieu habituel, entouré de matériaux de fer et de bois que sa main transforme tous les jours. Elle devait être, comme l'usine, un édifice où le travail spirituel fut incessant, où le va-et-vient fut continuel, car le nouveau curé avait l'ambition de rendre la maison de Dieu aussi fréquentée que les établissements de ce quartier populaire dont les salles regorgent de monde.»
     « Mais la maison de Dieu, si elle rappelait l'usine et l'atelier où l'ouvrier peinait tout le long de sa vie, devait aussi être une fête pour ses yeux et un réconfort pour ses membres. M. SOULANGE-BODIN voulait que les yeux pussent se baigner dans la lumière et que les poumons eussent à respirer largement de l'air pur. »
     Jules. ASTRUC choisit ainsi une structure métallique (135 tonnes de fer et d'acier) pour accentuer la parenté avec l'esthétique d'une usine et par ce choix, l'on revenait à l'un des prin¬cipes du gothique et de la Renaissance italienne : l'application des mêmes éléments d'architecture aux églises qu'aux édifices civils. Mals pour qu'il soit clair que l'on est dans une église, le choeur comme le porche quittaient le style usine pour rappeler celui, plus familier, à la prière, d'une abside romane. Et, probablement pour corriger l'accent un peu raide et froid de la structure métallique nue, toutes les chapelles latérales furent ornées de grandes peintures murales du plus pur style «Arts déco » (*) qui provoquent un effet de gaîté fort originale.
     Cet édifice, vaste comme une halle et harmonieux de proportions, est un unique et remar¬quable exemple de l'emploi du fer dans l'architecture religieuse. L'originalité vient surtout de la franchise du parti adopté: la structure métallique élégante dans sa légèreté et conçue d'un point de vue purement fonctionnel, sans le moindre ornement est d'une grande hardiesse, alors que le plan (nef flanquée de bas-côtés, choeur en abside voûtée d'ogives flanqué de deux absidioles en cul-de-four) et la façade sont tout à fait traditionnels.
     Il convient de souligner aussi un autre trait d’originalité pour une église parisienne : deux tribunes latérales, couvrant la longueur de la nef, surplombes de chaque côté les chapelles latérales. Ceci n’est pas sans rappeler les églises du Pays basque, d’où est originaire M. SOULANGE-BODIN.

     Note : Depuis plus de cent ans, divers articles ont commenté la naissance de l’église Notre Dame du travail. Il est normal que ces articles aient « pompé » les uns sur les autres pour s’adapter à l’objet de leur rédaction et aux lecteurs intéressés.
    
     Notes :
     (*) Ou plutôt « art nouveau » puisque le mouvement « art déco » est né vers 1925.
    

09 11
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mise à jour le 21/11/2007